Mardi 11 novembre 2008 Lc 17.1-6
Jésus disait à ses disciples : « Il est inévitable qu’il arrive des scandales qui entraînent au péché, mais malheureux celui par qui ils arrivent. Si on lui attachait au cou une meule de moulin et qu’on le précipite à la mer, ce serait mieux pour lui que d’entraîner au péché un seul de ces petits. Tenez-vous donc sur vos gardes ! Si ton frère a commis une faute contre toi, fais-lui de vifs reproches, et s’il se repend, pardonne-lui. Même si sept fois par jour il commet une faute contre toi, et que sept fois de suite il revienne à toi en disant : ‘ je me repends ‘ , tu lui pardonneras. » Les Apôtres dirent au Seigneur : « Augmente en nous la foi ! » Le Seigneur répondit « la foi, si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, vous diriez au grand arbre que voici : « déracine-toi et va te planter dans la mer », et il vous obéirait. »
Curieuse péricope. A première vue, les trois parties n’ont aucun rapport. Sauf si l’on regarde bien la première section : les scandales dont il est question sont ceux qui mènent au péché. Duquel s’agit-il, pour qu’il y ait un lien avec la suite :ce frère fautif, et cette foi en forme de catapulte ?
Le vrai centre du passage, c’est la Miséricorde, bien sûr. Le péché dont il est question, c’est le refus de pardonner. Par essence péché contre l’Esprit, le seul impardonnable, puisque l’Esprit est par nature l’ « Avocat ».
Mais alors, refuser de pardonner, ce serait jeter à l’eau notre frère, avec une meule de moulin au cou ? (Je vous rassure, l’autre bout de la corde est attaché à notre cravate). Et puis tout de même, il n’y va pas avec le dos de la cuiller : sept fois par jours ! Ca signifie en langage biblique « constamment » ! Le frère en question nous « casse les pieds » sans discontinuer, et, qui plus est, avec une sorte d’inconscience folle, puisqu’en même temps, il ose demander pardon !
Pour avoir tous fait l’expérience d’un pardon impossible (chacun à notre échelle, bien sûr), nous savons qu’en ce domaine tout est offert si nous en faisons la prière instante à Celui qui est, par nature, Miséricorde et Pardon. Du coup, oui, « augmente en nous la foi » devient la seule bouée de sauvetage pour les bains de mer, en osant faire cette demande de Miséricorde en nous. Et l’arbre qu’il faut déraciner, c’est celui du jugement tout fait : l’arbre de la connaissance du bien et du mal de la Genèse, où nous faisons rentrer ledit frère en coupe réglée de nos critères (taillés sur mesure pour que nous soyons les meilleurs, et lui le sale ou le pauvre c... au choix). Ce n’est que si nous acceptons de ne pas juger, de ne pas faire rentrer l’autre dans une grille de « bien » et de « mal » que nous pouvons lui faire de vifs reproches : ils auront ce goût de Vérité que l’enfermement du jugement leur aurait totalement interdit, le conduisant à la révolte contre nous et au désespoir contre lui-même. Ce n’est que si nous parvenons à déraciner tout ressentiment entre nous que l’arbre du Royaume, l’arbre de la Vie, peut reprendre sa place au centre du jardin, avec ses fruits de paix et de compassion pour ce frère qui, peut-être, souffre au fond de lui de cette infirmité qui le conduit à nous massacrer les baskets.
On ne va pas au paradis tout seul, mais dans une sorte d’arche de Noé où nous accueillons tous ceux que nous aimons et surtout ceux qui nous insupportent.
Denis
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