Vendredi 13 février 2009 Gn 3.1-8
Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que le Seigneur avait faits. Il dit à la femme : « Alors, Dieu vous a dit : ‘vous ne mangerez le fruit d’aucun arbre du jardin ?’ » La femme répondit au serpent : « Nous mangeons les fruits des arbres du jardin. Mais, pour celui qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, sinon vous mourrez. » Le Serpent dit à la femme : « Pas du tout ! Vous ne pourrez pas ! Mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. » La femme s’aperçut que le fruit de l’arbre devait être savoureux, qu’il avait un aspect agréable, et qu’il étati désirable, puisqu’il donnait l’intelligence. Elle prit de ce fruit, et en mangea. Elle en donna aussi à son mari, et il en mangea. Alors, leurs yeux s’ouvrirent, et ils connurent qu’il étaient nus. Ils attachèrent les unes au autres des feuilles de figuier, et ils s’en fient des pagnes. Ils entendirent le Seigneur Dieu qui se promenait dans le jardin à la brise du jour. L’homme et la femme allèrent se cacher au regard du Seigneur Dieu parmi les arbres du jardin.
« O, homme, qu’as-tu fait ? Pourquoi as-tu voulu t’enfermer dans la peur ! Je t’avais expliqué pourquoi ce fruit était toxique, combien goûter à cette façon de voir ceux qui t’entourent selon des grilles de bien et de mal allait t’éclabousser de vinaigre. Combien ce regard t’expose au même jugement de leur part, la même condamnation. Tu constates maintenant qu’aucun habit ne pourra t’en protéger : ce coup que tu pensais porter sans risque s’est retourné, et aucune armure ou fortification ne peut y parer. Aucune arme ne te mettra à l’abris des masques obscènes que l’on te collera au visage et dans lesquels on t’enfermera. Te voilà nu, désespérément nu, de cette atroce nudité défigurée dont tu as peur et honte, alors que jusque là, tu étais heureux et libre dans cette même nudité où tu dansais dans ta splendeur.
O, homme, il ne me reste qu’une solution : te laisser souffrir, souffrir et mourir de ces procès que tu intenteras aux tiens et qu’ils t’intenteront, procès d’intention liés à tout ce que ce regard peut déclencher de dépit, de jalousie, de haine, de reproches contenus qui éclateront tout à coup comme un énorme furoncle sur ton sein, bouton hideux sur ton front, lèpre puante sur toute ta peau… Je ne peux que te laisser hurler de douleur et de désespoir pour mesurer pleinement l’étroitesse du cercueil dans lequel tu t’es jeté. Et attendre jusqu’à ce que tu M’appelles au secours, désespères d’une réponse, pour qu’enfin je puisse te montrer, ô, toi que j’aime tant, une issue.
Je sais, ô, homme, que lorsque Je viendrai, tu me jugeras, et me feras partager ta mort, ce « mauvais sort » dont tu me rendras responsable. Mais Je te demande une chose, ô, homme : regarde bien, lorsque tu M’auras pendu au bois du jugement, lorsque tu M’auras cloué à cet arbre et que pour vérifier que Je suis bien mort, tu Me planteras un dernier dard dans le cœur, regarde bien : dans le reflet de l’eau qui coulera de mon côté, l’image renversée de l’arbre au fruit mortel : tu verras, dans cette eau de l’infinie Miséricorde, apparaître l’arbre de la Vie que tu avais perdu.
Alors, homme, lorsque tu réaliseras ton crime, lorsque tu réaliseras que même cela n’a pas pu M’éloigner de toi, lorsque tu réaliseras quelle promesse d’Amour t’est encore et toujours destinée, tu pourras à nouveau regarder ton frère avec cette même Miséricorde et la même Charité.
O, homme, vois, tout passera. Tout. mais l’Amour te sauvera toujours. Et maintenant, va…»