Dimanche 26 octobre 2008 Mt 22.34-40
Les pharisiens, apprenant que Jésus avait fermé la bouche aux sadducéens, se réunirent, et l’une d’eux, un docteur de la Loi, lui posa une question pour le mettre à l’épreuve : « Maître, dans la Loi, quel est le grand commandement ? » Jésus lui répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton âme et de tout ton esprit. Voilà le grand, le premier commandement. Et voici le second, qui lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Tout ce qu’il y a dans l’Ecriture –dans la loi est les Prophètes- dépend de ces deux commandements. »
Associer Dt 6.5 et Lv19.18 en un seul commandement, une nouveauté édictée par Jésus ? Ce serait nier le premier Testament : « c'est l'amour qui me plaît et non les sacrifices, la connaissance de Dieu plutôt que les holocaustes. »[1] Ce qui est mis en lumière ici, c’est l’ordre sans lequel ces trois amours ne peuvent être vécus. Car si « Les grandes eaux ne pourront éteindre l'amour, ni les fleuves le submerger. »[2], c’est que l’amour lui-même est un fleuve. Il faut qu’un fleuve aille jusqu’à son embouchure, et donne l’eau à l’océan que sont tous ceux qui nous entourent. Mais surtout, un fleuve a une source, sans laquelle il n’y a rien. Et l’océan devient mer morte.
« Il ouvre le rocher, l’eau jaillit » dit le Ps 104, rappelant Massa et Mériba[3]. Mis en miroir avec le Ps 50 : « Le sacrifice qui plaît à Dieu, c’est un esprit brisé : Tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un cœur brisé et broyé » ce passage s’éclaire en lisant « J’ôterai de votre chair le cœur de pierre, et je vous donnerai un cœur de chair. »[4]. Depuis la Genèse, nous sommes terre. Mais parfois, faute d’eau, faute de s’être « orientée » vers sa source intérieure, cette terre durcit. Une pierre ne peut redevenir terre qu’en étant « fendue », broyée, moulue par la compassion, mais surtout par la redécouverte de cet amour premier, de toute éternité, qui fait fondre toutes nos résistances, et couler cette source de Dieu en nous. Alors, nous devenons ce fleuve qui sourd du côté droit du temple.[5]
Etre fleuve c’est, devant cet amour premier, accepter de nous aimer nous-mêmes dans la vérité de l’humilité (humus de notre terre, de notre nature profonde). Ne pas s’aimer soi-même, c’est reboucher la source. Alors seulement, nous pourrons aller vers notre embouchure, vers tous ceux qui manquent d’eau, faire du désert un océan : transmettre, d’un regard, parole ou silence, geste ou immobilité, présence ou effacement discret, qui est Celui qui les aime de cet infini premier, qui désire être la source de leur vraie naissance. Ce Christ, Temple d’où sourd la première eau lorsque le soldat plante la lance[6]…
Mais la source en nous peut s’envaser, faute de nettoyer les boues de l’habitude, l’encrassement de l’oubli… Pour garder le cœur pur et voir Dieu nous aimer[7] retournons à la Source : sa Parole et ce premier commandement en forme de promesse: « Ecoute, Israël, tu aimeras… »[8]
Denis
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