Laïcs et Dominicains

Dieu n'était pas dans le tremblement de terre

I Rois, 19,11

La terre s’est secouée comme un animal féroce,

les montagnes ont tremblé et la mer s’est déchaînée,

les sols se sont ouverts et les bâtiments détruits,

un peuple fatigué de tant souffrir souffre de nouveau,

Nous avons vu leurs visages et entendu leurs pleurs,

les images sursautaient et frappaient.

les êtres humains déambulaient, corps écrasés,

destruction et mort, douleur et angoisse

à travers le tremblement de terre cruel et dévastateur.

 

Mais Dieu n’était pas dans le tremblement de terre…

 

 

Enfants sans mère, mère sans enfants,

Frères sans frères, amis sans amis,

Des milliers de vies écrasées à la seconde,

histoires, espérances, rêves, illusions,

disparues en un clin d’œil.
L’horreur a laissé sa marque indélébile

dans les regards perdus, dans les visages désolés,

dans les morts, les blessés, les mutilés,

dans chaque vie blessée par l’inattendu.

 

Mais Dieu n'était pas dans le tremblement de terre…

 

 

 

 

Quelqu’un a crié sa frayeur, d’autres voix se sont élevées,

quelqu’un a élevé une prière, d’autres ont suivi,

quelqu’un a chanté, beaucoup ont chanté

quelqu’un a levé une décombre,

et d’autres ont commencé à lever des pierres

quelqu’un a embrassé un blessé

et d’autres l’ont chargé dans leurs bras,

quelqu’un a tendu une main

et des milliers de mains se sont unies

 

et Dieu était avec eux !

 

Gerardo  Oberman du Réseau Oscar Romero . Amérique latine

Haïti : soigner, sauver, reconstruire

Elle est au fond, tout au fond.

« On ne la voit pas mais on l’entend. Son téléphone marche encore, elle répond quand son mari l’appelle. Le secouriste se faufile entre deux instables amas de béton, par un passage si étroit qu’un spéléologue hésiterait à s’y engager. Les caméras sont là. Elles y sont encore des heures plus tard quand elle est extraite de ce chaos qui faillit être son rude linceul. Quelques témoins applaudissent. Devant notre poste de télévision, nous applaudissons presque avec eux. Les sauveteurs méritent la gratitude de tous. »

D'après Geneviève Jurgensen

 

Devant notre poste de télé, nous sommes loin, si loin !

Que pouvons-nous faire pour soigner les blessés d’Haïti ?

Que pouvons-nous faire pour sauver les Haïtiens ?

Que pouvons-nous faire pour reconstruire les maisons d’Haïti ?

 

La solidarité.

Nous qui sommes capables de mettre en œuvre la solidarité dans notre quotidien, à travers des initiatives individuelles conduites dans une logique de proximité … nous devons bien nous rendre à l’évidence qu’il y a des cas où nous ne pouvons directement rien faire par nous-mêmes car tout semble hors de notre portée, et ne pouvons que  nous en remettre aux autres. Les moyens de la solidarité collective passent alors par les structures collectives qui sont seules en mesure d’intervenir : les dispositifs légaux nationaux ou internationaux conçus dans ce but, les associations, les ONG, etc.  

Pour Haïti, au-delà de notre sentiment d’impuissance, mais nous savons bien que d’autres peuvent être très efficaces sur le front des opérations. Nous n’avons donc en conscience qu’une chose à faire : leur donner les moyens de leur action en les aidant financièrement, et ils sauront exactement comment en tirer le meilleur parti.

 

Où adresser les dons ?

De nombreuses ONG ont lancé des appels aux dons pour soutenir les actions d’urgence en faveur des sinistrés. Préciser « Urgence Haïti » pour les dons par courrier :

-    Conférence des évêques de France, au nom de douze associations catholiques (www.eglise.catholique.fr).

-    Secours catholique-Caritas France, BP 455, 75007 Paris (www.secours-catholique.org).

-    CCFD-Terre solidaire, 4, rue Jean-Lantier, 75001 Paris (www.ccfd.asso.fr).

-    Épiscopat d’Haïti : Cefal (Haïti), service de la mission « Pôle Amérique latine », 58, avenue de Breteuil, 75007 Paris.

-    Aumônerie de Port-au-Prince (www.missionnaires-st-jacques.org).

-    Croix-Rouge française, « Séisme Haïti », 75678 Paris Cedex 14 (www.croix-rouge.fr).

-    Action contre la faim-Urgence Haïti, Libre réponse 64731, 75681 Paris Cedex 14 (www.actioncontre lafaim.org).

-    Handicap International, 14, avenue Berthelot, 69361 Lyon Cedex 07 (www.handicap-international.fr).

-    Médecins sans frontières, 8, rue Saint-Sabin, 75011 Paris (www.msf.fr).

-    Médecins du monde, Urgence Haïti, BP 100, 75018 Paris (www.medecinsdumonde.org).

-    Unicef, Urgence Haïti, BP 600, 75006 Paris (www.unicef.fr).

 

Un fond dominicain vient d’être créé

Il soutiendra les frères du vicariat provincial et les sœurs de 6 congrégations : Monteils (France), Missionnaires adoratrices (Canada), Présentation (Rome), Délivrande (France), Petites sœurs (France, Fatima (Porto Rico).

Les fonds recueillis seront destinés au dispensaire promu par l’initiative de solidarité Haïti 2010 (http://curia.op.org/jubilee) et au soutien des efforts de la Famille dominicaine sur le terrain pour reconstruire Haïti et faire face aux nécessités à long terme après le désastre.

Caractéristiques des virements bancaires en euros :

- Code IBAN: DE56500700100935424200

- Bénéficiaire : Istituto per le opere di religione, Cité du Vatican – Italie / Code SWIFT (BIC): IOPRVAVXXX

- Banque : Deutsche Bank, Taunusanlage 12 – 21, 60262 Frankfurt, Allemagne / Code SWIFT (BIC): DEUTDEFFXXX

- Référence et  objet du transfert : PP. Domenicani Curia Generalizia 27130001

 

Continuez à prier pour ceux qui souffrent.

La commission dominicaine internationale pour Justice et Paix, Toni Harris op et Carlos Rodríguez Linera op, Co-Promoteurs dominicains internationaux de Justice et Paix, [email protected]

12 janvier en Haïti, tout s'effondre !

Port-au-Prince, le 13 janvier

Bonjour

L’hôpital général au centre ville de Port-au-Prince est comble. Les malades sont dans la rue. Il est difficile de trouver une morgue pour enterrer les morts qui sentent depuis hier soir.

Mgr. Miot, archevêque de Port-au-Prince, est mort.

Des Facultés, des écoles, des églises se sont effondrées. Il ya des morts et des personnes sous les décombres mais il n’y a pas le matériel nécessaire pour enlever le béton et les toitures.

Tout à l’heure j’ai pu circuler en ville pour déposer le cadavre d’une élève morte hier soir. Il faut porter les cadavres à pied car certaines rues sont bloquées.

Les frères vont bien et ils s’occupent de leurs familles.

Notre logement chez les sœurs est resté intact alors que le noviciat des sœurs de Cluny s’est effondré en partie.

Nous avons passé la nuit dehors à prier. Heureusement le peuple haïtien a la foi. Les gens se sont rassemblés pour prier et chanter au milieu de cris et des gémissements.

Merci pour vos gestes d‘amitié et pour votre prière.

Nous allons bien grâce à Dieu.

Fr. Manuel

(reçu par e-mail)

 

 
Cette photographie est datée du 19 janvier. Ce jour-là, et pour quelques heures encore, les sauveteurs cherchent des survivants. Des ruines de cet immeuble, ils sauveront une jeune femme de 26 ans.

 

Port-au-Prince, le 18 janvier

« L’Eglise souffre dans ses personnes et dans ses bâtiments »

, Certains me demandent : “Que font les prêtres et les religieuses en ce moment ?” L’Église souffre dans ses personnes et dans ses bâtiments. Dimanche, peu de chrétiens ont pu célébrer la messe à Port-au-Prince. Ici, à Sainte-Rose de-Lima, où chaque dimanche on se réunit pour louer le Christ ressuscité, la chapelle s’est effondrée. Nous avons célébré la messe avec les religieuses et quelques laïcs dans la cour de l’école. L’église du Sacré-Cœur, importante paroisse qui rassemble des milliers de personnes, est en ruine. La cathédrale est inutilisable. La paroisse Saint-Louis-roi-de-France n’est plus en mesure d’accueillir des fidèles. Le P. Jean-Baptiste, montfortain, maître des novices, y est décédé mardi dernier.

Quant aux écoles, l’école Sainte-Rose-de Lima a été très endommagée. Le noviciat des Sœurs de Cluny ne peut plus être habité. La toiture s’est effondrée sans faire grâce à Dieu des victimes. D’autres écoles sont complètement détruites ou inutilisables. Beaucoup de religieux et de religieuses sont morts. Tous ceux qui ont survécu prennent soin des blessés de la congrégation et des laïcs proches. Le collège Saint-Louis-Gonzague, prestigieux établissement catholique à Port-au-Prince, s’est aussi effondré. Un frère de la congrégation (Frères de l’instruction chrétienne) est mort et un autre se trouve sous les décombres. L’école Rosalie-Javouhey – j’en suis aussi l’aumônier – proche du bidonville de Saint-Antoine est fissurée. (…) Plusieurs enfants avec qui je parlais encore la semaine dernière sont morts et enterrés.

« Dans chaque établissement catholique se vit le partage de nourriture. »

Beaucoup de personnes sont accueillies dans les écoles et les paroisses catholiques, surtout pour la nuit car nous continuons de dormir à la belle étoile. (…) Dans chaque établissement catholique se vit le partage de nourriture et dans la mesure du possible ceux qui ont des blessures sans gravité sont soignés par les sœurs ou par les médecins amis. (…) Il faudra tout reconstruire. Il y a les besoins immédiats de nourriture et d’eau. Il y a le défi de la reconstruction du pays et concrètement des églises, des écoles et de centres de formation théologique. »

Fr. Manuel Rivero o.p.

(Propos rapporté par « la Croix » du 19 janvier 2010)

Depuis 500 ans en Haïti !

Voici 500 ans que les frères prêcheurs, ou encore frères dominicains, sont présents sur l’île d’Hispaniola comme l’appela Christophe Colomb, une île aujourd’hui partagée en deux : Haïti, un pays pauvre parmi les pauvres, et la République dominicaine, un pays florissant dédié au tourisme. 

 

C'est à Saint-Domingue que le frère Antonion de Montesinos a défendu les Indiens Taïnos dans sa prédication du quatrième dimanche de l’Avent 1511. La communauté des frères prêcheurs sous la responsabilité du vicaire Pedro de Cordoba avait mené toute une réflexion sur les mauvais traitements imposés aux Indiens en flagrante contradiction avec l’Évangile. Touché au cœur, Bartolomé de las Casas  rentrera dans l’ordre de Saint-Dominique en ardent avocat des droits des Indiens.

Face à la mer, la statue de 15 m du frère Antonio de Montesinos rappelle cet événement.

 

Plus tard, aux XVII^e et XVIII^e siècles, les frères prêcheurs des provinces françaises de Toulouse et de Paris arriveront en Haïti pour évangéliser notamment la partie sud de l’île en administrant une quinzaine de paroisses.

 

Fin 2008, une communauté de 4 frères a été accueillie par les sœurs de Saint-Joseph-de-Cluny à Sainte-Rose-de-Lima, dans le centre de Port-au-Prince. Elle devait s’installer en janvier 2010 dans une maison du quartier de Pacot. Les frères se consacrent à l’aumônerie des écoles et à la pastorale universitaire de Port-au-Prince, en assurant des cours de catéchèse, de théologie et de langues bibliques. Ils lancent les Équipes du Rosaire en Haïti et sont actifs à la  fondation Montesinos dont l’objectif est de contribuer au reboisement d’Haïti avec des enfants démunis vivant dans les rues. Les sœurs dominicaines exercent leur apostolat dans la capitale et au Cap.

 

Comme aimait à le rappeler Mgr Pierre Claverie, dominicain, évêque d’Oran, assassiné sur sa terre d’Algérie, les frères prêcheurs sont appelés à vivre la mission en dialogue, bien au-delà de la simple tolérance envers ceux qui leur sont différents. C’est aux frontières de notre société et sur ses lignes de fracture que peut s’opérer la réconciliation entre riches et pauvres, protestants et catholiques,  Haïtiens et Dominicains de la République dominicaine …

Sur son lit de mort, saint Dominique a rassuré ses frères éplorés en leur promettant qu’il leur serait plus utile au Ciel que sur la terre. Aussi nous nous confions à sa prière.

 

Fr. Manuel Rivero o.p., Vicaire provincial

Epiphanie, l'étoile et le GPS

L’Evangile, Seigneur, rapporte que les mages ont vu une étoile. Pour  moi, elle s’est levée sans que j’en aie conscience, le jour de mon baptême. Par un enseignement catholique bien fait (malgré ses propres maladresses humaines), j’ai eu la chance qu’elle continue à briller, et que l’on m’ait appris à la repérer dans l’immensité. La tradition de l’Eglise est ainsi un des plus beaux cadeaux, un des plus grands trésors, or, encens et myrrhe disposés de ta part à mes pieds. J’ai eu la chance qu’à travers l’Ecriture, comme un GPS, cette étoile sache traverser les nuages, et même, je dirais, être plus présente lors des moments d’orage, où le ciel est lourd, que dans les jours de ciel pur - peut-être par ce que les jours de ciel bleu, la nuit présente la concurrence de milliards d’étoiles au firmament, toutes plus belles les unes que les autres, pour ma plus grande joie…

 Alors, mon Dieu, me voici comme un mage venu d’orient, venu m’agenouiller devant Toi qui ne m’as jamais lâché, Toi qui es venu Te faire « Emmanuel », ce « Dieu avec nous » partageant tout de nos deuils, de nos souffrances, de nos larmes et de nos joies, nous faisant le cadeau immense de ta Présence.

Alors si les mages, s’agenouillant, ont laissé ce qu’ils avaient de plus précieux, quel or, quel encens, quelle myrrhe vais-je pouvoir T’offrir ? Tout ce que j’ai, tout ce que je suis, c’est Toi qui me l’as offert.  Bien sûr, on me dira « offre-toi toi-même ». Certes, mais comment m’offrir au mieux ? « Cela dépend de chacun » me  répondra-t-on… Me voilà bien avancé. Alors, puisque le baptême qui a fait lever cette étoile nous demande d’être d’autres Christ, c’est à dire nous aussi, des « Emmanuel » au monde, je voudrais être cet « Avec », partageant tout des deuils, des souffrances, des larmes et des joies de tous mes « proches ».

Mais pour cela, même pour cela, j’ai besoin de ton aide. Je ne peux être « Avec » que si tu es cet « Avec » à travers moi. Sinon, je ne ferai que des bêtises, je me connais trop bien. Je T’en prie, Seigneur, et je sais que ma prière sera exaucée à la mesure où je Te laisserai la place pour la réaliser. Alors, Seigneur, la seule chose que je peux vraiment T’offrir, c’est ma disponibilité, et ma recherche assoiffée de ta Vérité qui me rendra libre des entraves que j’ai si savamment disposées devant Toi. Dans l’action de grâce pour cette étoile qui  ne cesse de me précéder.

Denis